En 2022, selon le baromètre Qualisocial/IPSOS, 30 % des salariés en France déclaraient avoir été victimes de harcèlement, 15 % déclarant une situation de harcèlement répétée. 44 % déclarent ne pas être suffisamment informés sur le sujet.
Ces situations sont souvent les causes d’une mauvaise ambiance, de démotivation voire d’arrêt de travail, quand les victimes ne sont pas, carrément poussées à la démission.
Pour prévenir ce fléau, les directions peuvent s’appuyer sur un référent harcèlement interne.
Si cette fonction est assez clairement définie pour les représentants du personnel, un éclairage est nécessaire sur son importance plus générale, dans les collectifs de travail.
Définir les harcèlements
Il existe, dans le Code pénal, une définition claire du harcèlement (art 222-32-2, du harcèlement moral du Code pénal).
Le Code du travail, quant à lui, comporte un chapitre entier sur le sujet (harcèlement moral du Code du travail).
Dans les deux cas, la notion de harcèlement porte sur des comportements répétés « portant atteinte au droit et à la dignité » de la personne qui le subit, « susceptible d’altérer sa santé physique et mentale » et/ou « de compromettre son avenir professionnel. »
Il existe des subtilités sur la notion de répétition des actes de harcèlement : cela peut être le fait d’une même personne qui répète des comportements sur un temps donné, mais aussi le fait de plusieurs personnes qui agissent ensemble.
Le harcèlement peut être moral, il peut aussi être :
- Sexiste : lorsque les comportements portant atteinte à l’intégrité de la victime concernent son sexe biologique ou son genre.
- Sexuel : lorsque les atteintes ou pressions en question sont faites dans le but d’obtenir une faveur d’ordre sexuelle. Attention, dans ce cas précis, la répétition des atteintes n’est pas obligatoire.
On considère que, compte tenu des conséquences des différentes formes de harcèlement sur la santé des personnes victimes, il doit être considéré comme un risque psychosocial.
En effet, les RPS, bien que n’ayant pas de définition définitive, sont considérées comme le fait qu’une organisation de travail puisse nuire à la santé mentale du salarié, indépendamment de son comportement personnel.
Si le harcèlement n’est pas toujours lié à l’organisation du travail, le fait de ne rien faire pour l’éviter peut devenir un vrai problème, en lien direct avec la politique RH.
Nommer une personne référente, lui donner les moyens d’agir en formation, en temps et en budget constitue un bon moyen d’éviter cette lacune.
Quelles sont les obligations, notamment sur la désignation d’un référent harcèlement
Selon le Code du travail, seules les entreprises de plus de 250 salariés ont obligation de désigner une personne référente sur les questions du harcèlement moral, sexuel et sexiste ainsi que sur celles des agissements sexistes au sens large.
Elle est chargée d’informer, d’orienter et d’accompagner les salariés sur ces sujets.
Si l’employeur bénéficie d’une certaine marge de manœuvre pour déterminer le positionnement du référent harcèlement dans l’entreprise et le détail de ses missions, le Ministère du Travail a fait néanmoins un certain nombre de préconisations :
- La réalisation d’actions de sensibilisation et de formation auprès des salariés et du personnel encadrant .
- La mise en œuvre de procédures internes visant à favoriser le signalement et le traitement des situations de harcèlement sexuel ou d’agissements sexistes (modalités de signalement, d’enquête…).
- L’orientation des salariés vers les autorités compétentes que sont l’inspection du travail, la médecine du travail et le Défenseur des droits.
- La réalisation d’une enquête interne suite au signalement de faits de harcèlement sexuel dans l’entreprise.
Le dernier point est à prendre avec beaucoup de précautions : une enquête interne comporte une obligation de neutralité.
Le fait qu’il puisse y avoir un doute quant à l’impartialité de la (ou les) personne(s) qui mènent l’enquête peut être préjudiciable à la structure dans ses décisions ou à la victime. Le choix de cette personne doit donc être fait avec prudence, en mettant ces notions en priorité et en n’hésitant pas à faire appel à des spécialistes externes si nécessaire.
3 Questions sur le référent harcèlement sexuel dans l’entreprise
Le rôle du référent CSE
Dans les entreprises de moins de 250 salariés, à partir du moment où un CSE existe, il doit nommer une personne référente sur les sujets de harcèlement et d’agissements sexistes.
Si son rôle n’est pas non plus clairement défini dans les textes, la fonction est similaire à celle citée précédemment.
Dans les entreprises de moins de 250 salariés (et de plus de 10), l’absence d’obligation de nommer une personne référente pour l’employeur fait que son rôle est particulièrement important.
En effet, on peut tout à fait considérer que le référent CSE puisse, aussi, avoir pour rôle de sensibiliser, informer et orienter les salariés sur les sujets de harcèlement, moral comme sexiste ou sexuel et les agissements sexistes.
Enfin, il est toujours fortement recommandé d’informer voire d’impliquer les représentants du personnel de et dans la tenue d’une enquête administrative.
La formation des référents harcèlement
L’article L2315-18 du Code du travail prévoit un certain nombre de jours de formation « nécessaire à l’exercice de leurs missions en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail. »
Ainsi, l’obligation de nommer un référent entraîne automatiquement celle de lui permettre de se former sur ces sujets.
Elle doit lui permettre de comprendre à la fois le cadre réglementaire, mais aussi des mécanismes qui concourent au harcèlement ainsi que les différents acteurs internes et externes qui interagissent sur ces sujets (inspection et médecine du travail, associations d’accompagnement des victimes, services RH, direction, etc.).
👉 La formation est ainsi obligatoire pour les référents CSE.
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Une formation impérative pour la protection des salariés et de la structure
Au-delà de cette obligation réglementaire, la formation des référents sur ce sujet est impérative. D’abord parce qu’elle leur permet d’être des acteurs précieux de lutte contre le harcèlement et les agissements sexistes.
Or, cette lutte s’inscrit pleinement dans l’obligation de l’employeur prévue par l’article 4121-1 du Code du travail : « l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. »
La suite de l’article prévoit les actes prévus dans la mission de référent harcèlement. Former les référents, c’est leur permettre de mener à bien cette mission.
Cela leur permet également de faire des propositions d’actions de prévention, d’être en mesure de construire ou d’améliorer des procédures de signalement ou d’alerte et surtout, de recueillir la parole des personnes victimes.
En effet, au-delà des impératifs de politique d’entreprise et RH, le fait d’avoir, au sein de ses équipes, une personne formée au recueil de la parole peut se révéler précieux.
D’abord, afin d’éviter un comportement qui pourraient se révéler dangereux dans le cas où une enquête devrait être menée.
En effet, les faits de harcèlement sont relativement rapidement prescrits en ce qui concerne les sanctions disciplinaires : l’employeur a un délai de 2 mois pour le faire, et s’il ne le fait pas, cela peut lui être reproché au titre de l’article 4121-1 cité précédemment.
De plus, ces alertes ou déclarations sont susceptibles de déboucher sur des procédures et nécessitent un certain formalisme : accueillir les émotions et ressentis d’éventuelles victimes sans pour autant qualifier les actes, avoir conscience que la direction seule peut décider de sanctions, être dans la discrétion la plus absolue, informer la victime de ses droits ainsi que des délais réglementaires, la diriger éventuellement vers des structures d’accompagnement et d’aide.
Si la fonction de référent n’est pas un métier en soi, elle demande néanmoins d’acquérir un certain nombre de connaissances et une posture formelle, y compris et surtout lorsqu’on doit accompagner les victimes.
Ainsi, même si leur nomination n’est pas obligatoire, une personne référente, formée et compétente sur ces sujets est toujours un atout dans le milieu professionnel.
Avoir un référent harcèlement nommé par l’employeur n’est pas toujours obligatoire. Cependant, dans les entreprises de moins de 250 salariés, la personne référente nommée par le CSE peut, si les relations sociales sont saines, jouer ce rôle et améliorer la politique de prévention et de lutte sur ces sujets.
En parallèle, même dans les petites structures qui ne bénéficient pas de CSE, une personne dédiée, formée au recueil de la parole, est un véritable avantage (ce type de formation peut être prise en charge par les OPCO au titre de la formation professionnelle continue).
Elle peut devenir l’auxiliaire de la direction dans la mise en place de la prévention de ces risques psycho sociaux et permet, au final, de gagner beaucoup en temps et de limiter certaines problématiques aux proportions bien souvent incontrôlables.
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