L’entretien professionnel est un passage obligé pour l’employeur et le salarié, et constitue un rendez-vous clé pour le développement des compétences des salariés et l’optimisation de la gestion des ressources humaines.
En quoi consiste exactement l’entretien professionnel ? Quelles en sont les spécificités ? Comment cet entretien doit-il être organisé ? Quelles sanctions sont-elles prévues en cas de manquement ? Plongeons au cœur de ce rendez-vous obligatoire entre employeur et salarié.
Si vous vous interrogez sur les règles légales en cas d’entretiens professionnels externalisés c’est par ici.
L’entretien professionnel : de quoi s’agit-il ?
L’entretien professionnel se concentre sur les possibilités d’évolution professionnelle du salarié, telles que la promotion, la mobilité professionnelle ou l’acquisition d’une certification. Cette approche dynamique permet de faire le point sur les qualifications du salarié et d’identifier les formations nécessaires à l’évolution de ses compétences.
Contrairement à l’entretien annuel d’évaluation, qui se concentre sur la performance du salarié, l’entretien professionnel ne vise pas à évaluer son travail. Il est un outil essentiel de la gestion des ressources humaines, organisé tous les deux ans minimum, ainsi qu’après certaines absences ou après des périodes d’activité réduite.
Le caractère obligatoire de l’entretien professionnel
Institué en 2014, l’entretien professionnel est une obligation légale désormais encadrée par la loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 2018.
Cette loi prévoit que tous les salariés ayant deux ans d’ancienneté dans l’entreprise sont concernés par cet entretien obligatoire, quel que soit le type de contrat : CDI, CDD, contrat de travail temporaire, contrat d’apprentissage, contrat de professionnalisation, etc. Cependant, les salariés mis à disposition de l’entreprise via la sous-traitance ou l’intérim ne sont pas concernés.
Impérativement organisé tous les deux ans, l’entretien professionnel peut voir sa périodicité modifiée par des accords collectifs. De plus, certaines situations obligent l’entreprise à organiser un entretien professionnel sans attendre ce délai de deux ans :
- Retour après un arrêt de travail pour longue maladie
- Retour de congé maternité ou d’adoption
- Retour de congé parental d’éducation
- Retour de congé de proche aidant
- Retour d’une période de mobilité volontaire sécurisée (dans les entreprises d’au moins 300 salariés)
- Retour de congé sabbatique
- Fin de période d’activité à temps partiel après congé de maternité ou d’adoption
- Fin de mandat syndical
Les travailleurs absents de l’entreprise ne doivent donc pas être convoqués puisqu’ils le seront au moment de réintégrer leur poste de travail. Tous les six ans, cet entretien doit être complété par un état des lieux récapitulatif.
Cet état des lieux permet à l’employeur de vérifier que le salarié a bien bénéficié d’un entretien tous les deux ans ou après certaines absences, et de faire le point sur les actions de formation et de progression dont le salarié a bénéficié.
Cette progression est examinée tant sous l’angle salarial que professionnel, incluant l’avancement hiérarchique et l’évolution des responsabilités.
Notons que si l’entretien professionnel est une obligation pour l’employeur, le salarié peut très bien refuser de s’y soumettre. Il est important que son refus soit exprimé par écrit et conservé par l’entreprise.
Comment s’organise l’entretien professionnel obligatoire ?
Conformément à l’article L. 6315-1 du Code du travail, la responsabilité de l’organisation de l’entretien professionnel repose sur l’employeur. Le salarié peut toutefois en faire la demande, notamment si l’entreprise ne l’a pas organisé ou s’il souhaite discuter de son évolution.
L’entretien doit être organisé pendant les heures de travail et est considéré comme du temps de travail effectif, donc rémunéré. Il se déroule généralement dans les locaux de l’entreprise, qui détermine les modalités d’organisation (personnes chargées de l’entretien, lieu, heure, moyens techniques, etc.), sauf accord collectif précisant d’autres modalités.
Avec l’essor du télétravail, le Ministère du Travail a indiqué que l’organisation de l’entretien en visioconférence ou par téléphone est possible.
Concernant la personne chargée de l’entretien, il n’y a aucune obligation légale spécifique. Dans les TPE, c’est souvent le chef d’entreprise qui s’en charge, mais cette tâche peut être déléguée au responsable des ressources humaines, au responsable de la formation ou au manager en charge du salarié, sous la responsabilité finale de l’employeur.
Cela impose de choisir une personne disposant des outils et des connaissances nécessaires. L’employeur peut également choisir d’externaliser les entretiens professionnels en les faisant réaliser par un prestataire externe.
Du côté du salarié, le principe est qu’il ne se fait pas accompagner sauf si une convention collective le prévoit. Si l’employeur accepte que le salarié soit accompagné, il devra adopter la même règle pour tous les salariés par la suite. L’entretien professionnel se clôture par un compte rendu écrit remis obligatoirement au salarié.
Le contenu de l’entretien professionnel obligatoire
En mettant l’accent sur les opportunités d’évolution de carrière pour le salarié, l’entretien professionnel permet de faire le bilan des compétences du salarié et de déterminer les formations nécessaires à leur développement.
Les points essentiels abordés pendant cet entretien incluent :
- Évolution professionnelle du salarié (qualification, poste, progression hiérarchique, etc.)
- Actions de formation, certification, progression salariale ou professionnelle
- Évaluation de l’employabilité
- Projet professionnel du salarié
- Validation des acquis de l’expérience (VAE)
- Compte personnel de formation (activation, abondement)
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Les bonnes pratiques de l’entretien professionnel
Loin d’être une simple conversation, l’entretien professionnel mérite une préparation minutieuse de la part de l’employeur comme du salarié. Il est donc essentiel d’informer correctement le salarié en prévoyant un délai suffisant entre la convocation et la tenue de l’entretien, afin de lui permettre de bien se préparer à ce rendez-vous obligatoire.
Il est également recommandé de planifier la date et l’heure de l’entretien en tenant compte des horaires de travail et du temps de repos du salarié, notamment pour ceux qui travaillent de nuit. Le choix du lieu n’est pas non plus anodin : un endroit calme et neutre est souvent préférable pour favoriser un échange serein et productif.
En outre, la durée de l’entretien doit être suffisante pour permettre des échanges approfondis. En pratique, une heure est souvent recommandée pour garantir la qualité des discussions. Enfin, la qualité de l’entretien peut s’accroître en recourant à des trames d’entretiens, comme celles proposées par Lucca, qui permettent de guider les échanges en alliant l’utile à l’efficacité.
Un entretien professionnel, c’est quoi ? (définition, aide, lexique, tuto, explication)
L’entretien professionnel obligatoire et l’entretien annuel : quelles différences ?
L’entretien annuel d’évaluation vise à apprécier le travail et les compétences du salarié dans l’exercice de ses fonctions. Cet entretien évalue les performances en fonction des objectifs fixés l’année précédente et permet également de définir les objectifs pour l’année à venir.
Contrairement à l’entretien professionnel, l’entretien annuel d’évaluation n’est pas une obligation légale. Sa finalité principale est d’assurer une évaluation régulière et structurée des performances du salarié, ce qui en fait un outil clé pour la gestion des ressources humaines et le développement professionnel. C’est d’ailleurs pour cela que le licenciement pour insuffisance professionnelle est le plus souvent déconseillé en cas d’évaluation annuelle satisfaisante.
S’agissant d’entretiens aux finalités différentes, ils doivent être organisés de manière distincte, ce qui n’empêche pas de les tenir l’un après l’autre moyennant des comptes-rendus distincts remis au salarié.
L’entretien annuel des salariés en forfait jours annuels : une obligation distincte de l’entretien professionnel.
L’employeur est tenu d’organiser chaque année au moins un entretien pour les salariés en convention de forfait en jours. Le forfait jours permet aux salariés de gérer leur temps de travail en comptant les jours travaillés plutôt que les heures.
Cet entretien a pour objectif de vérifier la charge de travail du salarié et de s’assurer que l’organisation du travail est compatible avec sa vie personnelle et familiale. Ce dispositif s’adresse principalement aux salariés disposant d’une grande autonomie dans l’exercice de leurs fonctions, notamment :
- Les cadres bénéficiant d’une autonomie dans l’organisation de leur agenda, sans contrainte de pointage des heures de travail.
- Les salariés dont la durée du temps de travail ne peut pas être déterminée à l’avance et qui organisent leur emploi du temps de manière autonome.
Cet entretien est obligatoire, et en cas de non-respect, la sanction pourrait être la nullité de la convention de forfait jours. Il est important de retenir que l’entretien annuel des salariés en forfait jours est spécifique et ne doit pas être confondu avec l’entretien professionnel ou l’évaluation annuelle.
Les sanctions liées à l’entretien professionnel
Toutes les entreprises sont soumises à l’obligation de réaliser des entretiens professionnels et des états des lieux récapitulatifs, mais seules celles de plus de 50 salariés sont concernées par la sanction en cas de manquement. En cas de non-respect, l’employeur doit verser 3 000 euros sur le Compte Personnel de Formation (CPF) du salarié concerné.
Le contrôle de cette obligation est assuré par les services régionaux de contrôle de la formation professionnelle, principalement les DREETS (Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités).
Il est donc crucial pour l’employeur de conserver des preuves de l’organisation de l’entretien professionnel, notamment via un compte rendu remis au salarié. Ce document démontre également que le contenu de l’entretien respecte les obligations légales.
Une autre sanction concerne l’employeur qui aurait privé un salarié d’entretien professionnel, quelle que soit la taille de l’entreprise. Les juridictions des Prud’hommes peuvent en effet condamner l’employeur à verser des dommages et intérêts au salarié pour mauvaise exécution du contrat de travail liée à la violation de l’obligation légale et conventionnelle de formation et d’entretien professionnel.
L’entretien professionnel au cœur de la BDESE
L’entretien professionnel s’inscrit dans le cadre plus large de consultation de la politique sociale de l’entreprise. En effet, parmi les données sur la formation reprises dans la BDESE, notamment afin d’informer le comité économique et social (CSE), doivent être mentionnés le nombre des salariés bénéficiaires de l’entretien professionnel.
Comme nous le voyons, l’entretien professionnel se présente comme un élément central dans le développement des compétences des salariés et la gestion stratégique des ressources humaines.
Au-delà des obligations et des sanctions imposées à l’employeur en cas de manquement, il constitue indéniablement un outil indispensable pour favoriser l’épanouissement des salariés et renforcer la compétitivité de l’entreprise.
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